Toute cette semaine, des « dîners dans le noir » sont organisés dans 7 restaurants de Nouméa qui ont accepté de jouer le jeu. L’occasion pour l’association Valentin-Haüy (AVH-NC), qui l’organise depuis 8 ans, de mettre les convives dans la peau d’un non-voyant, le temps d’un repas gastronomique. Mardi soir, un menu vegan était proposé au P’tit café.
Après Indian Gourmet lundi, les dîners à l’aveugle prennent place aux Trois Mâts et au P’tit café. Depuis la première édition, en 2013, cette formule à la fois caritative et gastronomique remporte un franc succès. Si bien que sur les 7 repas à l’aveugle organisés cette semaine, tous affichent complet. Inutile, donc, de réserver sa place avant l’année prochaine. « C’est un événement qui nous tient à cœur, à l’AVH-NC, car nous luttons pour l’inclusion des personnes déficientes visuelles.
Cela passe par plus d’autonomie dans le cadre d’ateliers axés sur le handicap », explique Virginie Antoine, la coordinatrice de l’association. Il est bon de rappeler que cette soirée n’est pas juste un jeu mais elle permet aussi une prise de conscience. Quelques indications s’imposent avant de commencer : « vous allez rejoindre votre table en file indienne. Une fois à table, vous devrez vous servir de l’eau sans aide, on vous assistera juste pour aller aux toilettes ou fumer une cigarette », explique la coordinatrice.
Les sens chamboulés
Une fois les masques revêtus, les conversations montent d’un ton. L’entrée ne tarde pas à arriver dans un brouhaha général. « Dès qu’ils sont dans le noir, les gens ont tendance à parler plus fort. C’est normal, on compense », commente Virginie. Les serveurs sont les seuls à pouvoir déambuler non masqués. Le chef, David Canot, a misé sur les odeurs pour mettre l’eau à la bouche des convives. Ils ne verront pas la présentation à l’assiette, loin d’être négligée pour autant. Le jeu consiste à deviner les ingrédients qui composent ce premier plat : un crumble aux légumes rôtis et son aïoli de patates douces agrémenté d’un mesclun d’herbes. « Il y a de la salade », estime Sidonie qui fait manifestement fausse route. « C’est un crumble », rectifie Marie-Christine. Toutes deux sont venues soutenir une amie non-voyante qui fait partie de l’association.
Un dîner solidaire
A la table voisine, Sylvie tente désespérément d’avaler une bouchée. « Il y a beaucoup de fourchettes vides ! », plaisante-t-elle. Suivront le plat principal, un civet de steak végan avec des légumes braisés, et le dessert, une tartelette crue au riz au lait de coco et sa ganache chocolat-passion. De quoi régaler les appétits les plus frugaux. Pour chacun des menus, différents chaque soir, les participants auront déboursé 7 500 francs dont 2 000 francs iront à l’association. Juste pour cette soirée, 66 personnes avaient réservé au P’tit café.
Lors de la première édition, les trois cents participants avaient permis à l’AVH de financer des ateliers de danse et d’art-thérapie. « Les subventions qui nous étaient accordées les années précédentes ont baissé de 15 millions à 5 millions de francs, alors que nous payons un loyer de 2,5 millions par an », tempère la coordinatrice. Si les repas dans le noir ne suffiront pas à compenser cette perte, ils seront certainement reconduits l’an prochain. En attendant, les prochains rendez-vous ont lieu à la Table des Gourmets, Alinéa, Marmite & Tire-bouchon et O’ Garden. Pour remettre le couvert… ou juste les mains, si le cœur vous en dit.
- Le crumble aux légumes rôtis servi en entrée.
- Seuls les serveurs n’étaient pas masqués.
- Les convives rejoignent leur table en file indienne.
- Marie a peur de renverser son verre.
- La bonne humeur était de mise.