A partir du 4 mai, le sport individuel sans compétition a repris progressivement. Il en va de même pour le sport adapté et le handisport. Dans quelles conditions cette reprise s’effectue-t-elle et quels sports sont concernés ? Le point avec José Marquès, président de la ligue handisport et sport adapté de Nouvelle-Calédonie.
Tout d’abord, pouvez-vous préciser la différence qui existe entre sport adapté et handisport ?
Le sport adapté s’adresse aux personnes qui ont une déficience mentale ou psychique tandis que le handisport est destiné aux personnes en situation de handicap physique et sensoriel. Pour les polyhandicaps, on étudie quelle est l’offre la plus adaptée en termes d’activités, surtout pour accéder à la compétition.
Qui sont les pratiquants, quel âge et quel niveau doivent-ils avoir ?
Localement, aucun niveau n’est requis au départ mais la notion de débutant ne concerne pas uniquement les jeunes athlètes car certaines personnes peuvent avoir un handicap lié aux accidents de la vie. Les plus jeunes sont ceux qui avaient déjà un handicap à la naissance et qui ont pratiqué en milieu scolaire, dès l’âge de 6 ans. C’est souvent par le biais des centres d’entraînement ou des associations que les enfants nous arrivent.
Quelles sont les activités sportives pratiquées sur le territoire et comment les sportifs sont-ils encadrés ?
Au sein de la ligue calédonienne, qui gère à la fois le sport adapté et le handisport, on a mis en place l’Académie des sports, avec des éducateurs spécialisés en natation, tennis de table et athlétisme. Cette école fonctionne en partenariat avec la province Sud. Des éducateurs sportifs sont mis à disposition, le plus souvent des athlètes de haut niveau, comme Pierre Fairbank. On récupère les jeunes sur leur temps de scolaire pour leur permettre de pratiquer, sur des périodes définies, une activité physique adaptée à leur niveau de handicap. La discipline la plus pratiquée est l’athlétisme, essentiellement les couses en fauteuil ou ambulantes et les lancers, avec plusieurs catégories. La natation compte beaucoup de pratiquants dans le cadre scolaire mais aussi une athlète de haut niveau en sport adapté, Delphine André.
Quel est le niveau de cette nageuse ?
Delphine a commencé à nager toute petite, sur le territoire, et elle a aujourd’hui un niveau international. Elle est classée « élite » sur les listes ministérielles et elle est à présent entraînée par Emmanuel Poissonnier au club du CNC. Elle a fait plusieurs podiums dont des médailles d’or aux derniers championnats du Monde de natation adaptée. Elle devait participer aux prochains mais ils ont été reportés à cause de la pandémie.
Comment s’est effectué le confinement, à partir du moment où les activités sportives ont cessé ?
Dès le 18 mars, on a mis tout le monde en arrêt. Comme l’athlétisme permet de limiter les contacts, c’était plus facile. On a mis en place des exercices à réaliser chez soi, avec des moyens d’enregistrement, et je les suivais à distance sur Messenger. Pour quelqu’un comme Sylvain Bova, qui est non-voyant, il a fallu lui installer une caméra et trouver le lieu et les exercices répétitifs adaptés à sa situation, qu’il pouvait faire seul. Habituellement, il court avec un guide. Sa compagne malvoyante l’a aidé à mettre en œuvre ses exercices. Pour les fauteuils, c’est Olivier Deniaud qui s’en occupait. On a acheté des rouleaux installés au domicile des sportifs, comme Nicolas Brignone et Pierre Fairbank. Ils avaient des créneaux horaires imposés pour les entraînements de façon à ne pas perdre pied.
Avez-vous pu maintenir la motivation des sportifs en l’absence de compétition et, pour certains, avec l’annonce du report des Jeux Paralympiques ?
Ils n’ont pas été démotivés mais déboussolés. Ils étaient prêts et plus qu’optimistes pour la sélection et, d’un seul coup, l’échéance repart sur un an. Il n’y a pas eu d’abattement mais il a fallu recentrer les objectifs. Même pour nous, c’est difficile de se focaliser sur un objectif qui s’éloigne. On a mis en sommeil le sport santé et le sport scolaire mais tous les athlètes ont poursuivi leurs entraînements. Pour certains, il a fallu s’adapter plus que d’autres, comme en natation, en l’absence de bassin. Delphine André était très contente de pouvoir retourner à la mer pour s’entraîner, dès que cela a été possible !
Comment s’est préparée la reprise post-confinement ?
On a repris les activités de façon étalée pour éviter de se retrouver tous ensemble au même endroit. On est allé sur la promenade Pierre-Vernier, au départ, pour ne pas être trop rapprochés les uns des autres. Pour Sylvain Bova, qui est relié à son partenaire avec un lien, on a adapté une baguette d’un mètre de long pour qu’il puisse courir avec son guide tout en respectant les gestes barrières. Et ça fonctionne !
Tous les pratiquants ont-ils repris les entraînements dès le 4 mai ?
Le 4 mai, on a pu revenir au stade de Magenta, tôt le matin pour éviter la promiscuité. L’avantage, c’est d’avoir les lignes marquées au sol qui permettent de respecter la distanciation. Un couloir fait 1m22 de large donc on peut mettre 3 personnes en ligne sans problème. Certains, comme les lanceurs, étaient confinés à Lifou et c’est Thierry Cibone qui s’en occupe. La reprise va vraiment commencer cette semaine, avec les scolaires et certaines associations, mais d’autres sports, comme le handibasket ou le tennis de table, n’ont pas encore repris. C’est un vrai problème car ce sont des sports de contact. Peux eux, il faudra attendre les six semaines imposées et poursuivre un entraînement individuel. Mais ils ont tous hâte de revenir !
Propos recueillis par Marianne Page