Parmi les 3500 adultes en situation de handicap à être reconnus en capacité de travailler en Nouvelle-Calédonie, la majorité est orientée vers le milieu ordinaire de travail. Cependant pour certains l’environnement de travail se doit d’être aménagé. Joël Kasarhérou, président du Mouvement pour la Calédonie Inclusive (MCI), porte un projet de création d’entreprise adaptée de lutte contre le gâchis alimentaire. Une première en Nouvelle-Calédonie.
L’emploi des personnes en situation de handicap est-il satisfaisant sur le territoire ?
Joël Kasarhérou : « Pas encore totalement. Il y a encore beaucoup de travail à faire dans ce domaine et les lois ne sont pas suffisamment opérantes. Les entreprises préfèrent bien souvent payer une contribution plutôt que d’employer une personne en situation car c’est une vraie logistique à mettre en place. Il faut aménager le poste, s’occuper des transports et prendre en compte les spécificités de chacun. Mais le plus compliqué, c’est l’ingénierie humaine. Finalement la chose la plus dure à changer, ce sont les comportements humains et le regard des gens sur le handicap. Même si sur le territoire, nous avons de nombreuses associations véritablement engagées et qui font bouger les choses ».
Est-ce que les nouvelles technologies pourraient aider à développer l’emploi de ces personnes ?
J.K.: « Ce sont de bons outils mais ce que nous promouvons, c’est l’inclusion sociale lorsque c’est possible. Pour cela, nous allons expérimenter à compter de septembre une activité avec laquelle nous allons récupérer les denrées invendables puis les transformer et les remettre sur le marché. Le but c’est de lutter contre le gâchis alimentaire. Pour cela, une convention a été mise en place avec la mairie de Nouméa et certaines entreprises locales pour récupérer leurs invendus. C’est un projet porté par l’Association de Coopération Sociale et Médico-Sociale (ACSMS), qui accueillera dès ses débuts 4 à 5 personnes en situation de handicap, encadrées par un cuisinier, dans l’ancien sanatorium du Col de la Pirogue. ” Liens solidaires ” va débuter son activité avec 4 à 5 des personnes en situation de handicap qui ont un projet professionnel orienté dans le secteur de la cuisine et une expérience antérieure dans le domaine. ».
Une des solutions à l’inclusion serait donc la création d’entreprises adaptées ?
J.K.: « C’est possible. Ce sont des établissements qui sont fonctionnels pour certains handicaps. Pour ” Liens solidaires ” nous lançons une marche à blanc sur quelques mois et selon les résultats nous nous inscrirons dans la démarche entreprise adaptée. En effet, il ne faut pas oublier que c’est une entreprise qui fera face à la réalité du marché comme toute autre société. C’est pour cela que l’on a voulu intégrer une « niche », un domaine pas vraiment développé sur le caillou, afin d’éviter la concurrence, et puis c’est une idée novatrice. Dans tout les cas nous avons mis en œuvre l’ensemble des aménagements nécessaires à l’accueil de public éloigné de l’emploi et qui ont besoin d’un encadrement et environnement adaptés pour développer leurs habiletés ».
Quels sont vos autres projets dans le domaine de l’emploi pour les travailleurs handicapés ?
J.K.: « Si le premier projet fonctionne, nous projetons d’ouvrir un restaurant qui ouvrirait le week-end. Il devrait être installé au-dessus de l’entreprise ” Liens solidaires “. Une autre société de transformation de matériel électronique pourrait également voir le jour. Cela prend du temps mais les combats législatifs, culturels et entrepreneuriaux continuent ».
Contact du mouvement pour une calédonie inclusive (MCI): [email protected]
Pour aller plus loin …
Qu’est-ce qu’une entreprise adaptée ?
Les entreprises adaptées se développent sur un marché concurrentiel et sont soumises aux mêmes contraintes de rentabilité et d’efficacité économique que les autres entreprises, ainsi qu’au Code du Travail.
Elles ont cependant certaines spécificités, dont celle d’employer des personnes en situation de handicap dans une proportion minimale de 80% de leur effectif total. Elles ont également une mission à caractère social et de promotion des individus.
En effet, leur vocation est de soutenir et d’accompagner l’émergence et la consolidation du projet professionnel de leurs employés en situation de handicap, grâce aux conditions d’emploi adaptées qu’elles leurs proposent. Elles visent la valorisation de leurs compétences, leur promotion et leur mobilité, au sein de la structure elle-même ou vers les entreprises dites « classiques ».
Ainsi les entreprises adaptées s’adressent à des profils particuliers de travailleurs handicapés qui rencontrent certaines difficultés au regard de l’accès à l’emploi, et qui de ce fait ne peuvent pas exercer ponctuellement ou durablement dans une entreprise « classique ».
Compte-tenu de leurs spécificités et en soutien à la réalisation de ces objectifs, les entreprises adaptées bénéficient d’un accompagnement financier dans le cadre d’un agrément avec le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, qui régit également leur fonctionnement.
Un appel à projet a été lancé pour la création d’entreprises adaptées en Nouvelle-Calédonie : pour plus d’informations, cliquez ici.